Aux Batignolles, une nouvelle butte parisienne

François Grether, architecte urbaniste de l'opération Clichy-Batignolles

Pourquoi cette appellation de Butte des Batignolles ?

Ce lieu « fait site », il a les dimensions de l’île Saint-Louis, et, entre des espaces ouverts, il se présente comme une portion de ville surhaussée qui se détache dans le paysage global. Des buttes, il y en a déjà dans Paris : les Buttes Chaumont, la Butte aux Cailles, la Butte Montmartre. Ce terme permet à la fois d’englober la dimension topographique et d’évoquer un fragment de territoire. Avec la Butte des Batignolles, on opère un lien entre les architectures et les espaces publics. C’est une nouvelle silhouette qui va émerger dans Paris, qui va constituer une forme d’entité, avec un intérieur riche et complexe.

Comment vivra-t-on sur la Butte des Batignolles ?

Il s’y passera toujours quelque chose. L’intensité, au sens de la diversité des usages et des populations, était l’une des priorités de la mairie de Paris. Ainsi, les bureaux installés côté voies ferrées ont l’avantage d’amener une diversité de rythme de vie. Ils font aussi écran au bruit des voies de chemin de fer. Il y a des commerces tout au long de la rue, des boutiques sur deux étages et deux moyennes surfaces côté rue Cardinet. Les logements, extrêmement variés, participent  de cette intensité. Étudiants de  la résidence doctorale, élèves des groupes scolaires, propriétaires, locataires d’horizons divers : toutes sortes de gens habitent ici et croisent ceux qui viennent travailler ou faire leurs courses, ceux qui viennent prendre le métro, ceux qui se rendent au cinéma.

A quoi ressemblera la voie qui traverse la Butte des Batignolles du nord au sud ?

L’accessibilité de la rue était aussi une priorité. Nous voulions une continuité la plus plate possible, malgré la hauteur du socle de la butte. La rue monte à seulement 4 % de la rue Cardinet au pont, elle est régulière jusqu’à la passerelle, puis redescend légèrement vers l’allée Colette Heilbronner. C’est une rue large, mais la chaussée seule ne fait que 6,40 m. La majorité de l’espace est réservée aux piétons et aux terrasses. Il y a des lieux plus intenses, comme le carrefour au niveau du pont sur le réseau ferré. On pourrait y acheter la presse à un kiosque à journaux puis déposer les enfants à l’école. Devant le cinéma, l’ambiance est plus calme, plus tranquille. Près des logements étudiants, le sol est aménagé pour qu’on puisse s’y asseoir. Nous y espérons des expositions, des marchés, toutes sortes d’événements.

Comment la Butte des Batignolles est-elle reliée au parc ?

Les riverains sont en contact constant avec le parc Martin-Luther-King, quatre entrées mènent vers les pentes du parc. C’est un prolongement du parc. On trouve partout des plates-bandes, des buissons, des essences variées. Dans les bâtiments, des îlots plantés, des terrasses et toits aménagés, des balcons intègrent  la nature à ce morceau de ville. Les habitants comme les occupants des bureaux auront des vues sur le parc.

La Butte des Batignolles représente 1 520 logements et des surfaces de plancher équivalentes en bureaux, commerces ou équipements publics, avec des immeubles de 50 mètres de haut, eux-mêmes construits sur un socle de 10 mètres : comment atténuer la densité de ce lieu ?

Certains des immeubles font effectivement 50 mètres de haut grâce à la révision, en 2011, du plan local d’urbanisme, qui a relevé de 37 à 50 mètres la hauteur maximale autorisée des constructions dans la ZAC Clichy-Batignolles. Mais c’est justement ce qui crée une silhouette urbaine originale et moins massive. Le fait de monter partiellement à 50 mètres quelques immeubles, sans augmenter leur surface, permet de dégager de l’espace au niveau de la rue. Cela crée aussi plus de vues et de perspectives, d’autant que les bâtiments sont perpendiculaires à la rue et ne forment pas un front uni. Partout il y a des ouvertures, de la lumière qui cassent les linéarités et créent un paysage mixte.

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    François Grether, architecte urbaniste de l'opération Clichy-Batignolles