L'intelligence collective a tiré les projets vers le haut

Dominique Alba, Architecte, Directrice générale de l'APUR

Pourquoi avoir proposé la formule de l'atelier ?

La première question à se poser, quand il s'agit de concevoir la ville, est celle-ci : quelle est la méthode la mieux adaptée aux enjeux du projet ? Il n'y a pas de réponse unique. A Clichy Batignolles, les enjeux étaient d’abord urbains. On est à la fois en plein Paris et dans un no man's land, dans un grand paysage ouvert qui n'offre quasiment aucun repère sur le plan formel. En parallèle, nous avions à traiter une grande complexité programmatique et l’ensemble des partenaires, en particulier les élus, avaient mis les usages au cœur du sujet, avec la question du plaisir d'habiter, de travailler, de partager, sans oublier le rôle de  l'espace public, toujours central. Faire appel à l'intelligence collective nous a paru être la meilleure approche pour tirer les projets vers le haut sous ces différents aspects. Le dialogue entre les projets était également essentiel : l'objectif numéro 1 était de trouver les bons rapports de masse des bâtiments entre eux, et d'arriver à faire circuler l'air, le soleil et le parc. C'est d'abord cela, la qualité.

Quels résultats a-t-il apportés ?

Nous étions pratiquement dans une posture de recherche en grandeur réelle, chacun acceptant de faire bouger son projet pour améliorer les prospects, les vues, l'ensoleillement tout en assurant la constructibilité des programmes… Certaines solutions ont été trouvées au terme de longues discussions, chose qui aurait été rigoureusement impossible dans une situation de concours ; nous aurions probablement eu des îlots fermés là où nous avons au contraire réussi à faire entrer le parc dans la profondeur du bâti. A partir du moment où les architectes avaient en quelque sorte coproduit la morphologie globale au niveau macro, ils déclinaient naturellement les mêmes principes dans leur propre projet, ce qui explique que nous ayons autant d'espaces extérieurs dans les programmes par exemple. L'atelier a aussi permis de suivre les projets jusqu'au bout, de ne pas laisser les contraintes techniques et les équations financières amenuiser les qualités d'usage.

Que reste-t-il à faire ?

Il reste à préciser le rapport à l'espace public, ce qui commence par définir l'espace public lui-même. Cela sera du ressort des échanges en cours avec François Grether et Jacqueline Osty. Les choix de matériaux en façade restent également à faire, sans doute pour confirmer l'atmosphère paisible qui se dégage aujourd'hui de l'ensemble. Je le pense car c'est aussi l'un des avantages de l'atelier que d'avoir rendu inutiles les gestes ostentatoires ou exhibitionnistes : il ne s'agissait pas d'être vu mais d'être juste. Cette sobriété est également de bon augure pour l'autre aspect encore à affiner, celui des coûts. Nous devrions être à l'abri des mauvaises surprises dans ce domaine, d'une part parce qu'il n'y rien de superficiel dans les projets, mais aussi parce que les opérateurs ont fait chiffrer la construction au fur et à mesure. C'est toujours une excellente chose quand les entreprises entrent tôt dans les projets.